Gel douche : un cocktail chimique dangereux ?
Depuis 20 ans, le gel douche a envahi les salles de bains, et 80% des Français disent le préférer au savon traditionnel. Il s’en vend même plus de 500 000 par jour ! Les marques de cosmétiques et les grandes surfaces redoublent alors d’imagination. Elles n’ont même de cesse de développer et proposer un choix toujours plus faramineux entre odeurs, textures, et packaging qui fleurent bon les saveurs fruitées et naturelles…ou pas.
Gel douche, un objet marketing
Mais savons nous vraiment ce qu’il y a dans les gels douches et comprenons-nous bien les étiquettes sur lesquelles sont noyées des informations nébuleuses pour le quidam qui fait simplement ses courses ?
A titre d’exemple, l’indication « hypoallergénique » est une pure invention marketing puisqu’elle ne correspond à rien dans la pratique d’un point de vue d’une exigence sanitaire ou d’un barème quelconque.
Le gel douche comme escapade bucolique
Détoxifiant, satinant, nourrissant, euh vraiment ? Les arguments ne manquent pas pour laisser penser que le gel douche est bon pour le corps et pour la peau, et pourtant…Certains ingrédients peuvent en effet être dangereux et toxiques pour la santé.
Le visuel, le parfum annoncé, et l’étiquette sont en effet au cœur de la stratégie marketing des industriels du (pseudo) savon. Gros plans de fruits, couleurs chatoyantes, tout est bon pour évoquer la nature chez certains, tandis que d’autres pontes du gel douche tracent leur chemin sur le créneau de la masculinité ou encore de la séduction et de la sexualité, un peu comme en parfumerie.
Le consommateur, et surtout le consommatrice (le cœur de cible) sont en effet des proies dont la psychologie a été étudiée au scalpel, tant et si bien que l’acte d’achat relève presque de d’un acte compulsif. Le mécanisme de passage à l’action s’effectue en effet en moins d’une minute, le temps de regarder le prix, l’emballage et de sentir !
Saveur, odeur…on en mangerait !
Le marketing sensoriel, le procédé qui consiste à stimuler les sens pour convaincre le futur client d’acheter, était d’ailleurs basé sur le visuel et l’olfactif avant d’aller encore plus loin dans la persuasion. Ainsi, le goût est au centre des techniques désormais, un vrai non-sens pour un produit qui sert à se laver et qu’il ne faut surtout pas manger.
De là à dire que c’est un danger pour les enfants qui imagineraient voir des fraises galoper dans leur flacon avant de s’intoxiquer en le goûtant, il n’y a qu’un pas…Encore plus pervers, certaines saveurs, ou plutôt odeurs, sont carrément inspirées de notre enfance avec des biscuits et bonbons factices mais qui paraissent plus vrais que nature quand on les respire.
Par ce biais, les fabricants de gels douche croisent ainsi deux univers, celui de l’hygiène et celui de l’alimentation, afin de capter tous les sens du client qui pense de bonne foi faire du bien à toute sa famille en remplissant son caddie de pétrochimie en flacons.
Sous les sunlights des tropiques
Les publicités que nous avons tous vu un jour au petit écran allaient aussi dans ce sens, une stratégie appuyée par la puissance de l’image. On évoquait ainsi les tropiques, les vacances, des corps à la plastique parfaite moussant de plaisir sous la douche en se lavant avec un produit à l’aloe vera apaisant pour le corps. Une recette éprouvée qui fonctionne, avec à cela l’ajout de promesses de sensations incroyables et intenses lorsque l’eau du pommeau glisse sur cette peau badigeonnée de gel douche.
Le gel douche pour la santé
Les plus évolutifs ont ensuite emboité le pas en vendant à la ménagère un produit qui allait lui changer la vie si l’on parle d’avoir la peau douce, avec notamment le fameux « avant-après » …tout y passe.
Cette nouvelle ère et cette évolution du marché a alors accentué le phénomène de storytelling, l’art de raconter une belle histoire autour d’une marque, et ainsi immerger la clientèle dans un univers bien particulier indissociable de la marque.
L’autre levier marketing qui découle de ces orientations est l’émotion en s’adressant à l’inconscient. Le but est alors de créer une sorte d’addiction au produit, vous persuadant que vos gels douches sont bons pour vous et font bien plus que vous laver.
Quelle est la vraie composition d’un gel douche ?
Les parfums sont reconstitués chimiquement avec des molécules de synthèses.
En effet, utiliser un arôme naturel reviendrait à 10000 euros le kilo, alors qu’avec une cinquantaine d’ingrédients on peut imite l’odeur d’une fleur (lavande, muguet…) ou d’un fruit (cerise, citron…) avec un coût de fabrication de 20 euros du kilo cette fois-ci. C’est cela qui explique notamment le prix final d’un flacon de gel douche et qui le rend accessible à n’importe quelle bourse.
Le naturel est ainsi exclu, à plus forte raison lorsqu’il s’agit d’inventer des gels douches avec des odeurs plus ou moins fantaisistes inspirés du goût de certains gâteaux par exemple.
Un simple détergent ?
Comme dans toute recette, il y a un mode opératoire et les matières premières sont pesées minutieusement avant d’être incorporées les unes avec les autres. Mais les ingrédients ne se suffisent pas à eux même puisqu’ils sont mixés avec de l’eau et des tensioactifs, c’est-à-dire des agents lavants, des agents moussants, mais aussi des agents hydratants, des agents émollients.
Au total on dénombre une ou plusieurs dizaines d’ingrédients dans la formulation d’un gel douche, afin que ce dernier ait une odeur agréable et une texture ferme, mais qui glisse sur la peau tout en moussant le plus possible.
La mousse (qui n’a aucune origine naturelle) est en effet le nerf de la guerre quel qu’en soit le prix pour la santé du consommateur, et c’est la vitrine de ce savon qui n’en est pas un ! L’onctuosité de la mousse, la présence de bulles généreuses sont en effet des indicateurs scrutés et testés par les marques sur des volontaires.
On retrouve ainsi :
- 80% d’eau
- 15% de tensioactifs
- 4% d’épaississant texturant
- 1% de colorant, parfum, et conservateurs
Mais qu’est ce qui fait mousser ?
Un ingrédient revient sodium laureth sulfate, un agent moussant chimique très efficace, peu cher, et irritant pour la peau. On le retrouve dans :
- Les détergents industriels
- Les produits de ménage
- Du liquide vaisselle
Est également de la partie le sodium benzoate, un conservateur lui aussi irritant.
Et les fameux extraits de fruits vantés par les illustrations ? Ils arrivent souvent très loin derrière dans la composition, et sont à la traine (moins de 1% dans la majeure partie de cas). La publicité est alors clairement mensongère puisque le fabricant joue la carte de la nature alors que l’odeur mise en avant est littéralement noyée dans les produits chimiques et autres sulfates bons marchés.
Gel douche sans parabène…oui mais…
Dès que le flacon de gel douche surjoue l’élément naturel star ou la preuve scientifique dermatologique mise en avant, méfiance. Que la promesse soit fallacieuse est une tromperie d’un point de vue commerciale, mais ce n’est pas le plus grave.
Au début des années 2000, certains conservateurs comme les parabènes font l’objet d’une vraie chasse aux sorcières lorsque certaines enquêtes révèlent de quoi il s’agit : des perturbateurs endocriniens.
A l’image du sans sucre ou sans huile de palme, on assiste alors durant les années qui suivent à un défilé de savons, shampoings, et gels douche « sans parabène ». C’est la nouvelle fenêtre de tir des industriels du savon sans savon pour séduire le consommateur.
Un allergisant encore plus toxique pour la peau
Là aussi, la machine marketing fonctionne à plein puisque les marques proposent à l’arrivée un produit encore plus nocif grâce au conservateur de substitution adopté depuis 2005 : le méthylisothiazolinone. Ce produit chimique que l’on trouve aussi dans le maquillage est un puissant allergène qui fait des ravages sur la peau, à tel point qu’il fut abandonné quelques années auparavant pour être remplacé par…le parabène !
Le gel douche hydratant pour bébé qui est censé protéger les peaux sensibles et qui est parfois employé par les personnes ayant la peau fragile, en contient également malgré les mentions « hypoallergéniques » ou « ne pique pas les yeux » sensées rassurer enfants et parents.
L’avis des dermatologues
Les mentions qui font cas de chaudes recommandations par les dermatologues sont également autant d’arguments de ventes mensongers dans la plupart des cas.
Là aussi, la technique markéting est bien rôdée et c’est un peu la même que celle utilisée au petit écran pour vanter les mérites et les bienfaits d’un dentifrice par exemple. Prenez un figurant ou le cadreur qui passait par là, enfilez-lui une blouse blanche, et faite croire à qui veut bien l’entendre qu’un médecin valide le produit. Cette figure d’autorité mise en scène a pour but de manipuler les foules et les masses. C’est le cas du spécialiste de la peau qui aurait donné son aval pour la mise sur le marché de telle ou telle marque.
Des formulations biaisées
Les marques de cosmétiques sont autorisées par la loi à utiliser le méthylisothiazolinone dans leurs formules jusqu’à 0.01%, un taux qui peut paraitre très faible voire sans danger. Le problème, et non des moindres, est que l’on se lave avec du gel douche tous les jours, et c’est donc la répétition de cette dose (associée à tous les autres polluants ingérés en s’alimentant et en respirant) qui fait que l’exposition aux allergies et aux maladies et bel et bien réelle.
De même, le parahydroxybenzoate de méthyle est le nom scientifique pour les parabènes et une parade usitée par certaines marques de gels douches et shampoings pour flirter avec la ligne rouge et mentir au consommateur non informé. La loi européenne stipule pourtant que la mention parabène doit être désormais clairement inscrite puisque c’est bien ce nom qui figure sur la nomenclature des ingrédients et cosmétiques.
Quelle alternative au gel douche ?
Face aux nombreux scandales sanitaires sous-jacents, aux enquêtes dérangeantes et aux compositions de gels douche qui font froid dans le dos, le savon naturel a de plus en plus le vent en poupe surtout quand il est bio. Issu de la saponification, une réaction entre la soude et des huiles naturelles, il nettoie en outre bien plus efficacement. Il prend également soin des peaux sèches ou fragiles sans risque allergique, ce qui n’est pas un luxe à court et à long terme.